Récemment érigé en commune, Nguidjilone entre dans une nouvelle phase de son histoire marquée par l’avènement d’une nouvelle gouvernance locale. Pendant des années sous la direction d’autres circonscriptions, les populations Nguidjilonoises prendront en main leurs propres préoccupations dans un contexte marqué une gouvernance inclusive et concertée conformément à l’acte 3 de la décentralisation. Retour sur la longue trajectoire d’une nouvelle commune
Retour sur l’histoire
Situé sur la rive gauche du fleuve Sénégal, à la frontière entre Sénégal et la Mauritanie, le village de Nguidjilone est fondé au XIIIe siècle. Le nom Nguidjilone vient ainsi de l’arbre « Guidjilé » qui remplissait le village à l’époque. Le premier homme à habiter ce village s’appelait Hamady Hassane et faisait partie de l’ethnie « Ceddo » communément appelée « koliyabé » en langue puulaar. Nguidjilone est aussi appelé Dara (wouro koliyabé). A l’image du Fouta, la population Nguidjilonoise est essentiellement composée de Peuls. Ainsi la population, suivant les estimations, passe de 6000 habitants en 1997 à 7200 habitants en 2007 dont 52% de femmes et 48% d’hommes avec une forte majorité de jeunes. Composée de 519 foyers « fooyre » comprenant 973 familles, elle est à très grande majorité Haal – pulaar – en avec des minorités Wolofs et Maures. L’émigration touche plus de 80% des familles et 45% des hommes actifs. A l’inverse, on enregistre le retour des émigrés de France. Ces populations vivent principalement de l’agriculture notamment irriguée, de l’élevage et de la pêche, des transferts migratoires. Mais on note un essor remarquable des corps de métiers émergents (commerce, menuiserie métallique et bois, transformation de céréales, service de coiffure et couture, boulangerie etc.…). Dans ce cadre, les femmes sont très actives dans le commerce (légumes, poissons, habillement, divers) et les jeunes ont tendance à se fixer pour s’activer dans les activités de commerce et services (couture, coiffure etc…). Au plan des atouts, le village possède des potentialités naturelles composées des ressources en eau du Fleuve Sénégal, des mares, des nappes sous terrains, des ressources foncières pour près de 4000 hectares , des ressources forestières , des ressources animales pour 6400 têtes de bétails (bovins,ovins,caprins,équins).
Nguidjilone, la cité religieuse
Nguidjilone est connu comme étant l’une des cités religieuses du Fouta et la terre qui a vu naitre de Grands érudits de l’Islam. Parmi eux, figure Thierno Yéro Baal Hanne qui, de tout vivant, enseignait l’Islam et la « Sounna » du Prophète Mohammad (Paix et Salut sur Lui). Thierno Yéro Baal était un grand homme de Dieu qui a illuminé tout son temps et même les générations passées de par sa connaissance ésotérique. Après avoir maitrisé tout le Saint Coran, il a émigré en Mauritanie pour terminer sa formation, avant de retourner au bercail pour continuer à enseigner le coran et la Sunna du Prophète Mohamed (PSL). Le véritable nom de Thierno Yéro bal est Amadou Moctar HANNE, il était un « Waliyou » hors du commun. Au-delà de sa connaissance de l’Islam, son énigme résidait dans le fait qu’il soulevé en chacun de ses disciples la pureté d’ALLAH Soubahanahou Wa Talla. Tous les talibés de Thierno Yéro Baal HANNE étaient des Waliyous et ont tous fondé de grands foyers religieux dans le Fouta. Il a ainsi enseigné de grandes figures comme Thierno Alpha Hachimou Tall (petit fils d’El hadji Oumar Tall, Halwar), Thierno Cheick Hamidou Kane (MATAM), Thierno Hamet Baba Talla (Thilogne), Thierno Amadou Tidiane Wone (Kaédi) et Thierno Mamadou Thierno Yéro BAAL (Nguidjilone). L’œuvre de Thierno Yéro Baal Hanne sera perpétuée par son fils Thierno Aliou Anne qui repose aujourd’hui à la Grande Mosquée de Nguidjilone. La Ziarra Annuelle de Thierno Aliou Hanne est aujourd’hui un rendez-vous religieux de haute dimension où les fidèles musulmans viennent de tous les coins du Sénégal et du monde pour magnifier l’œuvre du saint homme (Thierno Aliou Thierno Yero Baal Hanne)
ADVN, une association au service de son terroir
L’Association pour le Développement du Village de Nguidjilone (ADVN) a été créée en 1983 par les ressortissants de Nguidjilone en France. De même, en 1984 la section de Dakar a été mise en place ainsi que la section mère de Nguidjilone. Dans cette foulée, les autres sections se sont constituées dans les pays à forte immigration (Cote d’Ivoire, Gabon, Congo, Mauritanie). Plus récemment les autres sections sont nées dans d’autres pays (Italie, Espagne, USA…).
L’ADVN a pour but de rassembler tous les fils de Nguidjilone autour d’un idéal commun à
savoir l’amélioration des conditions de vie des populations en faisant de sorte que celles-ci
soient les véritables acteurs du développement social et économique du village. Cette
orientation stratégique qui vise à relever plusieurs défis doit nécessairement pour son
opérationnalité, passer par les axes suivants : l’intensification de la production agricole en vue d’atteindre l’autosuffisance alimentaire, la promotion des activités génératrices de revenus, la scolarisation de tous les enfants en âge d’aller à l’école et le développement de l’alphabétisation fonctionnelle, la couverture sanitaire en assurant aux populations les médicaments de base, l’approvisionnement en eau potable, la lutte contre l’exode rural et la réinsertion des émigrés, la protection et la sauvegarde de l’environnement, le développement du partenariat et le bon voisinage. L’ADVN a réussi à réunir toutes les populations de Nguidjilone autour des idéaux de solidarité, de partage et surtout de développement. C’est ainsi que toutes les réalisations sont presque à son actif. La diaspora Nguidjilonoise, à travers toutes les sections de l’ADVN, a largement contribué aux nombreuses réalisations qui ont pour noms la construction de forage, d’écoles, de collège, de dispensaires, de marché ainsi que la réhabilitation des infrastructures locales.
Education : l’excellence un credo à Nguidjilone
La première école primaire est construite et inaugurée dans les années 50 et en 2015, Nguidjilone compte trois écoles primaires, un collège d’enseignement moyen, un lycée, une maternelle et un lycée moderne en phase de construction. La localité constitue également un grand centre d’examen dans la circonscription de la région de Matam. Toutes ces infrastructures traduisent l’excellence et la place de l’éducation dans cette contrée du Sénégal. En effet, Nguidjilone a toujours réalisé d’excellents résultats dans le domaine éducatif et « l’école Nguidjilone » est aujourd’hui considérée comme un exemple dans la région de Matam. De l’élémentaire au secondaire en passant par le moyen, Nguidjilone a toujours réalisé des bons en avant et a produit de grands cadres qui servent aujourd’hui l’administration sénégalaise.
La commune de Nguidjilone, une nouvelle dynamique de l’administration locale
Nguidjilone est érigé en commune en 2011 suite au nouveau découpage administratif du Sénégal. Auparavant il était rattaché à la Communauté rurale de Bokidiawé. Cette nouvelle configuration administrative est consacrée par le DECRET 2011-421 du 29 mars 2011, portant création de la Commune de Nguidjilone dans le Département de Matam, Région de Matam. Ainsi selon le rapport du décret, la seule préoccupation était de permettre à l’Administration d’être plus proche des administrés. En effet, Les réformes intervenues en 2008 et qui ont vu l’érection de plusieurs localités, dans la région de Matam en collectivités locales, avaient essentiellement pour objectif de mieux rapprocher l’administration des administrés. Toutefois, à l’épreuve de la pratique, certaines localités se sont retrouvées très éloignées du Chef-lieu de la collectivité locale à laquelle elles sont rattachées, avec les conséquences négatives que cette situation engendre. Aussi, est-il apparu nécessaire de créer la commune de Nguidjilone distraite de la communauté rurale de Bokidiawé, dans l’arrondissement de Ogo. Ainsi la nouvelle commune de Nguidjilone, regroupant les villages de Nguidjilone (Lodiou, Vélingara et Somma), de Ali Wouri et de Kédélé, avec une population de près de 10.000 habitants, pourra prendre en charge l’ensemble des questions relatives à son développement socio-économique.
Suite aux élections locales de juin 2014, les populations de la nouvelle commune ont porté leur choix sur la personne de Sada Ndiaye, un natif de Nguidjilone, qui devient ainsi le premier magistrat de la collectivité locale.
Nguidjilone face aux défis de l’émergence
A l’ère de l’émergence, la commune de Nguidjilone fait face à plusieurs défis. Dans un contexte de communalisation intégrale annoncée par l’acte III de la décentralisation, la jeune commune de Nguidjilone aura le défi de s’adapter à cette nouvelle configuration administrative en essayant de gérer de manière inclusive et concertée les préoccupations des populations. Dans la même perspective, les acteurs politiques, de la majorité comme de l’opposition, ont l’obligation de garantir la stabilité de la commune par le respect du jeu démocratique. Malgré son statut de nouvelle collectivité locale, Nguidjilone reste confronter à plusieurs problèmes liés au manque d’infrastructures routière et sanitaire, l’emploi des jeunes, l’enclavement entre autres.
Ces énormes défis interpellent non seulement l’équipe municipale mais également les autorités étatiques qui doivent conjuguer leurs efforts pour la prise en charge des préoccupations des populations dans un Sénégal où l’émergence est toujours d’actualité.
Yéro Mamadou Guissé
Blogueur, Activiste, Rédacteur et Diffuseur de contenus web